Plusieurs modifications au régime d’expropriation ont eu lieu dans la dernière année. Deux changements majeurs sont à retenir : la nouvelle Loi concernant l’expropriation (« LCE ») et les nouveautés en matière d’expropriation de fait (ou « expropriation déguisée »).

La LCE est entrée en vigueur le 29 décembre dernier, et une grande partie des modifications touche la détermination de l’indemnité à être versée à la partie expropriée. En effet, dans l’ancienne loi, l’essentiel de l’information concernant l’indemnité d’expropriation se retrouvait à un seul article. Depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, l’indemnité définitive prévue est constituée de différentes indemnités. Celles-ci correspondent à l’indemnité immobilière, l’indemnité en réparation des préjudices, l’indemnité pour perte de valeur de convenance et l’indemnité pour les troubles, ennuis et inconvénients. De plus, des approches d’indemnisation selon la situation de la partie dessaisie sont maintenant prévues. Ainsi, l’indemnité immobilière est constituée de la valeur marchande de l’immeuble exproprié et de l’indemnité relative à l’approche applicable.

Parmi les autres éléments d’intérêt dans la nouvelle loi, il est également nécessaire de parler de l’avis d’expropriation, qui devra dorénavant indiquer minimalement la valeur marchande du droit exproprié et la date de libération du bien. Il s’agit d’une nouveauté importante, puisqu’il faut procéder à une évaluation préalable de la valeur du droit à être exproprié avant de faire parvenir un avis d’expropriation à la partie dessaisie.

Dès lors, une municipalité qui doit se lancer dans un processus d’expropriation aurait tout intérêt à s’assurer de bien connaître les nouvelles règles entourant ce processus.

En ce qui a trait à ce que l’on appelle communément le recours en « expropriation déguisée », il faut savoir que le nouvel encadrement de l’expropriation de fait se retrouve aux articles 245 et suivants de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (« LAU »). Il est maintenant prévu qu’un « règlement d’urbanisme peut restreindre l’exercice du droit de propriété, sans pour autant donner lieu au paiement d’une indemnité, à moins que les restrictions soient tellement sévères qu’elles empêchent toute utilisation raisonnable d’un immeuble ». De ce fait, un acte d’une municipalité affectant l’usage d’un immeuble n’entraîne pas nécessairement l’obligation d’indemniser. Le législateur a donc confirmé le courant jurisprudentiel constant des dernières années à cet égard.

Les modifications apportées permettent aux municipalités d’exercer leur rôle en matière de protection de l’environnement ainsi qu’en matière de santé et sécurité des personnes et des biens. Par conséquent, une municipalité bénéficie de l’application d’une présomption en sa faveur selon laquelle l’atteinte au droit de propriété est justifiée dans l’unique mesure où elle est capable de satisfaire à l’une ou l’autre des conditions spécifiques prévues : (i) la protection d’un milieu humide et hydrique, (ii) la protection d’un milieu autre qui a une valeur écologique importante, (iii) quand l’acte est nécessaire pour assurer la santé ou la sécurité des personnes ou la sécurité des biens.

Soulevons finalement que le nouvel article 245 LAU a un effet déclaratoire. Ainsi, les tribunaux saisis de dossiers judiciaires au moment de l’entrée en vigueur des modifications sont tenus de se conformer à cet article comme s’il avait toujours existé.

Me Anne-Marie Asselin

Avocate

Lavery Avocats

Me William Bolduc

Avocat

Lavery Avocats